On relève d'emblée, dans la pratique photographique de Julie Maresq, une physionomie d'ensemble portée par une forme de réalisme. L'impression première qui en émane renvoie, en effet, à une correspondance concrète avec un monde sans artifice ni excès, un monde authentique habité par des personnages ordinaires, tels qu'on en rencontre dans nos vies de tous les jours. Pour autant, ce lien direct avec la réalité, bien qu'il paraisse évident, est relativement difficile à circonscrire lorsque l'on adopte un regard plus analytique, parce que l'on ne sait dire avec exactitude quels sont les éléments, dans ces photographies, qui confortent cette idée de réalisme. Il semblerait pourtant que la consistance même de la réalité, chez Julie Maresq, constitue un point d'ancrage essentiel dans la lecture de son travail, dès lors que le réalisme se présente, à de nombreux égards, comme une  pellicule opaque venue se superposer à d'autres intentions, un peu à la manière d'un masque qu'il s'agirait de retirer, afin de percevoir des éléments qui vont au-delà des apparences.   
Aussi pouvons-nous préalablement identifier le réalisme qui réside dans les photographies de Julie Maresq : est-il lié à la nature même des lieux, eux qui contextualisent et imprègnent chaque image, chaque scénette, en possédant une contenance relativement quelconque ? Sont-ce davantage les lumières qui, en paraissant naturelles, ne valorisent rien de particulier, de manière à restituer un sentiment de neutralité ? À moins que cela ne repose, plutôt, sur ces individus, ces personnages, aux bras ballants et aux postures désincarnées, qui prennent la pose, parfois conscients de l'objectif, de façon à restituer un indéchiffrable paysage humain ? 
Il y a, naturellement, dans ces photographies, un peu de tout cela. Ici, un jardin en fin d'après-midi qui donne sur une clôture en brique usée par le temps ; ailleurs, une chambre à l'atmosphère quelque peu surannée. Elle paraît saturée de solitude. Plus loin, l'intérieur d'une habitation, parfois décorée avec soin, affirmant des univers intimes qui polarisent le regard scrutateur du spectateur, à la recherche d'un je-ne-sais-quoi interrogatif spéculant sur l'art et la manière qu'ont les gens de vivre en leur demeure. Voilà des espaces que l'on partage ou que l'on projette. Ils se rapportent à une idée du commun et de l'ordinaire, ce que confirment, somme toute, les jeux de lumière : en extérieur, les ciels sont parfois gris, mais toujours clairs, rendant difficile l'évaluation précise du moment de la journée où ont été réalisées les photographies ; dans celles  prises en intérieur, nul éclat ni exagération, juste une clarté qui s'apparente à de la netteté, comme pour induire un sentiment de douceur, un climat fait de calme et de latence où tout semble un peu hésitant. 
On a l'impression, dans la pratique de Julie Maresq, qu'il est nécessaire de désamorcer la possibilité de produire la moindre digression sur le cours des choses. Si le réalisme renvoie à une préoccupation certaine pour le quotidien, le familier, à l'événement qui jamais ne survient, sans doute est-ce parce que l'extraordinaire n'a pas toujours fait bon ménage avec une représentation de la vie réelle. Lorsque l'on a pour projet de retranscrire la nature même du monde qui nous entoure, ou en tout cas certains de ses atours, dans un rapport de justesse et de bien-fondé, il peut sembler naturel, en première instance, de ne pas intervenir à son propos, et de le montrer tel qu'il semble être. Ce postulat pourrait être un point de départ dans le travail de Julie Maresq, ce qui, en vertu de cette idée de réalisme, finirait d'inscrire ses photographies dans une sorte de filiation avec une tradition de la photographie documentaire. Mais voilà, quelque chose de son travail prend le contre-pied de ce réalisme, affirmant au contraire que le rejet du spectaculaire n'est pas incompatible avec une réalité qui se défausse, comme on le constate, au fur et à mesure que l'on progresse, chronologiquement, dans son parcours. 
Il y a par exemple cette série, datée de 2006 et intitulée Vendanges, pour laquelle différents individus, posés devant l'appareil photographique, immobiles, parfois assis sur une chaise de jardin, tantôt dignes et intransigeants, tantôt emprunts de nonchalance, absorbent le regard de la photographe, et par ricochet, le notre, de façon à réverbérer des psychologies confidentielles que l'on ne saurait percevoir autrement. Ici aussi, le réel, mais les images semblent dire davantage que ce qui est montré. Les gestes et les ébauches paraissent étonnamment sereins, non pas saisis de confort, mais à l'aise, car écrits dans un rapport de captation avec la photographe, un peu comme si ces différentes figures avaient été domptées par elle ou, plutôt, introduits à une forme de confiance mutuelle. En cela, on ne saurait trop insister sur la proximité fondamentale que Julie Maresq entretient avec ses sujets ; c'est peut-être là que réside, somme toute, cette idée de réalisme, dans ses photographies : un réalisme qui se rapporte davantage aux liens invisibles noués entre les individus qu'à la volonté de mimer, en reproduisant à l'identique, jusque dans ses moindres détails, les aspérités du réel. Aussi, sans doute peut-on dire, en conséquence, que la réalité qui est donnée à voir est celle d'individus dont on aurait retiré les codes et les usages liés aux apparences, pour en conserver une sorte d'essence élémentaire, encore que celle-ci reste polarisée par la relation qui s'est tissée avec l'artiste. Si on peut dire, évidemment, que le portrait d'une personne est aussi le portrait d'une époque ou d'une société, ne serait-ce parce qu'une large place est accordée à l'environnement immédiat afin de mettre en évidence des personnalités qui s'expriment aussi par leur fonction sociale ou culturelle, dans le cas présent, cette réalité sociale est atténuée au profit d'une réalité individuelle qui, le cas échéant, est bien plus représentative que la plus aboutie des analyses sociologiques. On s'en rend compte lorsqu'avec la série 71 lits rue Yves Gilloux, des jeunes filles, pensionnaires d'un internat, sont photographiées, parfois à plusieurs dans leur chambrée. Là également, cette identification au quelconque et à l'ordinaire, cette impression d'arrêt temporel, mais aussi une redondance spatiale, dès lors que les chambres paraissent se répéter de photographie en photographie, participant sans doute à la mise en évidence, comme en négatif, des personnes qui les habite. Sujets sensibles ou sujets propices à toutes sortes de préjugés, ces jeunes femmes dévoilent une part d'elles-mêmes tout en dissimulant, par pudeur, embarras ou retenue, une certaine fragilité. Ici, ce ne sont pas les contours précis de leurs parcours respectifs, de leurs expériences ou de leurs aspirations qui sont affirmés. Pourtant, le sentiment d'une irréductibilité reste particulièrement fort, comme si chacune, à la mesure de sa présence photographique, était à même de communiquer un infime quelque chose éminemment caractéristique de la personne qu'elle est.
En un sens, on pourrait apparenter le rapport que Julie Maresq entretient avec la réalité à la pratique d'un peintre désireux de dresser le portrait d'une personne, en adoptant une approche figurative, bien qu'il se laisse la possibilité de jouer sur certains éléments comme la couleur, les formes, la composition, afin de se rendre au plus près d'une vérité sensible qui anime tous les êtres. Par ailleurs, on doit, en partie, aux compositions et aux mises en scène que sollicite Julie Maresq la possibilité de voir au-delà des semblances, car c'est peut-être lorsque les corps s'articulent aux espaces qui les enserrent que les personnalités s'expriment le mieux. Mises en scène plus ou moins appuyées, selon les photographies : les voici extrêmement ténues, dans le cas des Vendanges, partielles et parfois réservés, dans la série des 71 lits, alors que pour la série des Charlotte, réalisée sur près de sept années, elles sont mises en exergue, de telle sorte que la petite Charlotte, en plus de manifester une présence qui évolue et se consolide avec le temps, semble avoir, simultanément, mille visages et un seul. La série des Charlotte souligne ainsi, à nouveau, cet écart entre le réel, l'essence, d'un côté, et l'artifice, le faux-semblant, de l'autre. À vrai dire, on assiste avec cette série à une accentuation de la mise à l'écart, ou mise en abîme, du rapport au réel, dès lors que le quelconque cède la place à un travail de fictionnalisation. Charlotte est en effet une enfant comme toutes les autres, qui brille par sa personnalité et est familière de l'artiste, mais le travail de construction pictural, qui se met en œuvre à partir de nombreuses photographies et sur des années, fait aussi de Charlotte un individu qui tient davantage du comédien investi par différents rôles, de façon à enclencher une diversité de réalités parallèles, parfois allégoriques ou simplement narratives. C'est pourquoi on peut dire de Julie Maresq qu'elle s'empare d'une esthétique du quotidien pour la retourner contre elle-même, ce que l'on observe plus précisément, comme en point d'orgue, dans la série plus récente des Familles harmonieuses
Préalablement, un article paru dans un magazine stipulant que pour vivre dans le bonheur et l'harmonie, il faut avoir deux filles. Les Familles harmonieuses présentent ainsi une succession de photographies reprenant certains codes de la photographie familiale : des parents, leurs enfants, deux filles en l'occurrence, des attributs domestiques, un mobilier d'intérieur qui reflète des imaginaires esthétiques marqués par des goûts, des choix et des stratégies en matière de décoration. Des couples mixtes, ou homosexuels, des couples de générations plus ou moins similaires avec, dans tous les cas, un sentiment de cohésion, d'équilibre, une idée du bonheur, sans aucun doute, en dépit de la rigidité des poses et du relatif sentiment de neutralité qui compose ces visages. Puis l'on se rend compte que ces deux filles apparaissent d'une photographie à l'autre : il s'agit, incidemment, des deux filles de Julie Maresq. En reposant sur la mise  en avant de familles factices, ce qui est contrefait est l'affirmation d'un idéal de la prospérité, dès lors que l'artifice, ici, semble renvoyer à l'arbitraire des représentations et des archétypes. On perçoit, en outre, avec les Familles harmonieuses, une proposition plastique qui s'ancre dans des prises de position sociales et sociétales, mais ce qui interroge davantage est le fait pour l'artiste de recomposer ces familles avec ses propres enfants. 
C'est alors que l'on prend la mesure, chez Julie Maresq, de son rapport au réel : celui-ci suppose une forme d'appartenance quasi viscérale à l'égard de ce qui est représenté, non pas en procédant par affinité ou par choix plastique, mais par l'affirmation d'une implication émotionnelle que peu de choses peuvent véritablement contester. Sans doute n'y a-t-il rien de plus réel, lorsque l'on pratique la photographie, que le fait d'avoir pour sujet une part de soi-même. Le geste consistant à donner ses propres enfants à d'autres, dans un cadre photographique, est, du reste, relativement fort, ne serait-ce que pour sa portée symbolique, de même qu'avoir ses propres enfants comme motif de prospection picturale et artistique, comme c'est le cas avec une série plus récente, La couleur des filles, permet d'aboutir à une autre lecture du travail de Julie Maresq : les reflets du quotidien qu'elle sollicite, à travers son objectif, ce souci du réel et de l'ordinaire, ces thématiques liées à l'enfance, à la famille, les individus qu'elle cite et qu'elle met en situation, en tenant compte des attaches invisibles qui pourtant les unissent, son empathie pour eux, tout ceci contribue à une œuvre où ce qui est examiné, saisi puis capturé par la photographie, repose moins sur le monde, sur la façon avec laquelle il fonctionne, que sur une part d'elle-même ; il y a bien une dimension autobiographique dans toutes ces images, alors qu'il a toujours été question, par pudeur ou par honnêteté, de se focaliser sur tous les autres.
Julien Verhaeghe, critique d'art

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